Les Ondes Courtes pour les nuls
En ce début de XXI è siècle, la radio n’est plus ce qu’elle était jadis. On ne se réunit plus autour du poste pour écouter des émissions. On l’entend plus qu’on ne l’écoute, en faisant généralement autre chose. Elle sert à nous réveiller (grâce au radio-réveil) et nous donner les nouvelles fraiches et joyeuses (?) du matin. Elle sert à tuer le temps lors des déplacements automobiles, étant donné qu'on ne peut rien faire d'autre en conduisant. Evidemment, on reste toujours branché sur la même station de la bande FM. Plus personne n’écoute les grandes ondes, ni a fortiori les petites ondes qui sont en voie de disparition complète. Quant aux ondes courtes, la plupart des jeunes et des moins jeunes ne savent même pas que ça existe encore !
Et pourtant elles sont encore bien vivantes. Il suffit de faire un tour de cadran sur un petit transistor possédant cette gamme pour le constater. A qui sont donc destinées toutes ces émissions dans toutes les langues si personne ne les écoute ?
Et bien justement si, il y a des gens qui les écoutent, mais pas en Europe. Les ondes courtes sont très écoutées en Afrique, en Asie, en Amérique du Sud et dans tous les pays où la FM n’est pas utilisée et où le réseau internet n’existe pas. Pour tous ces pays, la radio en ondes courtes est la principale source d’informations du monde extérieur, d’autant plus que les postes de radio avec gammes OC sont d’un prix très modique et qu’ils peuvent fonctionner sur piles dans les endroits privés d’électricité.
De plus, même dans les pays « peu démocratiques », les gouvernements n’ont aucun moyen de censurer ces émissions venues de très loin. Les ondes courtes ne connaissent pas de frontières. C’est ainsi qu’on peut entendre sur les ondes courtes à la fois la propagande officielle de la Corée du Nord et, d’autre part, la Voix de l’Amérique s’adressant aux Coréens (dans leur langue) pour dénoncer les mensonges de Pyongyang. Certes, certains gouvernements pratiquent le brouillage des émissions étrangères non conformes, mais ce brouillage est généralement peu efficace pour l'auditeur qui désire vraiment être informé.
Pour les rares écouteurs européens et nord américains (un peu plus nombreux) qu’on nomme SWL (shortwave listeners), l’approche est assez différente, puisqu’on est déjà submergé par de multiples sources d’information. Le jeu consiste à capter et répertorier les stations les plus lointaines et les plus exotiques, comme certains collectionnent les papillons, comme d’autres observent au télescope les étoiles et les galaxies.
Quand on commence à se repérer dans ce vaste paysage hertzien, dans ce brouhaha planétaire, dans ces stations internationales, dans ces langues étrangères, dans les kilohertz et les mètres, dans les indications du S-mètre, quand on commence à comprendre quelque chose à la propagation des ondes variant avec les saisons, avec les heures du jour et de la nuit, avec le cycle solaire, alors cela devient vraiment passionnant.
Certes, on peut maintenant écouter les radios lointaines sur le web, mais cela n’a pas le charme des ondes courtes. Ecouter Radio New Zealand en direct avec une antenne télescopique, c’est autre chose que de cliquer bêtement sur une tablette. La magie de la radio, c’est justement qu’il n’y a rien de matériel entre son poste et la lointaine station émettant du bout du monde. Rien sinon les ondes mystérieuses et fantasques rebondissant sur d’immatérielles couches ionisées de la haute atmosphère dont le comportement est parfois imprévisible. On ne sait jamais avec certitude ce qu’on va entendre à un moment donné. Soit une station familière ou peut-être une station rare que théoriquement on n’avait aucune chance de trouver là. Il faudra, par contre, renoncer au confort d'écoute auquel la FM nous a habitués. Il faudra parfois tendre l'oreille ou utiliser des écouteurs pour comprendre, à cause du fading, des interférences et des parasites divers qui font tout le charme des réceptions lointaines. Sur ces fréquences, on pratique l'écoute sportive !
Contrairement à ce qu’on pourrait croire, la chasse aux stations lointaines ne nécessite pas un gros investissement. Mais il faudra tout de même investir dans un récepteur possédant un affichage numérique afin de savoir précisément sur quelle fréquence on est. Les récepteurs analogiques (ceux qui ont une aiguille se déplaçant derrière un cadran à la graduation imprécise) ne feraient que décourager les débutants. On trouve de bons appareils à affichage numérique à partir d' une centaine d’euros (ou plus si affinités) avec lesquels on pourra débuter dans de bonnes conditions. Ensuite, on pourra améliorer grandement la réception en bricolant des antennes. La construction d’antennes est aussi un aspect passionnant du hobby. Il peut s’agir d’un simple fil de quelques mètres accroché sommairement à l’antenne télescopique pour entendre une station faible qu’on n’entendait pas avant. Il suffit aussi parfois de s’installer au fond de son jardin pour avoir une réception beaucoup plus pure que dans la maison où sévissent les parasites domestiques. Ces petites expérimentations ne coûtent rien et sont très instructives pour comprendre comment ça marche. Prudence cependant : le virus des ondes courtes, si on l'attrappe, est généralement incurable !
Une chose bien réconfortante pour terminer : non seulement l’internet n’a pas tué les ondes courtes, mais il s’avère être un précieux auxiliaire pour les SWLs. Jadis, on identifiait péniblement les stations en se référant à des bouquins ou des listes photocopiées plus ou moins à jour. Maintenant il existe de nombreux sites avec des bases de données actualisées permettant de n’être jamais perdu sur les ondes courtes. On tape la fréquence qu’on écoute : on a le nom de la station. On veut écouter telle ou telle station ? on la sélectionne dans la liste et on a sa fréquence, ses heures d’émission dans telle ou telle langue.
Shortwave info est l'un des meilleurs sites dans ce domaine.
Le web est vraiment sympa avec les vieux media démodés !
Difficile de s'y retrouver sur un poste analogique. Mais parfois ça marche !